AN 2000 : LES RISQUES JUIDIQUES DES SSII.

 

 

A l’aube du 21ème siècle, alors que depuis des années, les dirigeants du monde entier pensent aux différentes festivités possibles pour le passage au siècle nouveau, nos informaticiens ont continué à programmer en ne tenant pas compte de ce changement mathématique.

 

En effet, le principe informatique repose sur un système d’horloge qui pour des motifs de gain de temps en programmation, ne s’axe bien souvent que sur deux chiffres. Ainsi l’année 1930 est-elle traduite informatiquement par le chiffre 30. L’an 2000 serait alors représenté  par 00 faisant doublon avec 1900 et ainsi de suite pour les années qui suivent. Sans évoquer que les chiffres 00 ou 99 représentaient les dossiers à effacer…

 

De cet état de fait, les entreprises ont du réagir pour mettre à jour leurs systèmes informatiques et devant la manne de travail, ont dû fait appel aux SSII (Société de Service en Ingénierie Informatique).

 

Or, et les informaticiens ne nous contrediront pas, le zéro défaut n’existe pas. C’est un objectif impossible à atteindre et le basculement an 2000 risque de poser des problèmes non sans conséquence pour ces SSII, notamment en matière de Responsabilité Civile et donc de couverture.

 

Pour les assurances, le remède a été simple. Les contrats qui ne prenaient pas en compte l’an 2000, et donc qui ne l’excluaient pas, ont été dans la plupart des cas, dénoncés. Les services juridiques des groupes d’assurances se sont penchés sur le problème et ont vite compris les conséquences de ce passage. A ce stade, seul remède pour les SSII, négocier un avenant spécifique an 2000.

 

A défaut d’avenant, voilà nos SSII non couvertes pour leur Responsabilité Civile. Première vigilance : vérifier que les contrats de prestations de service sur la « migration an 2000 » n’imposent pas une obligation d’assurance. Dans ce cas de figure, et si le contrat a déjà été signé, il faut écrire au client pour le prévenir ; Mieux vaut un contrat rompu qu’un contrat qui met dans l’illégalité.

 

Après cette vérification, il s’agit pour la Société Informatique de se protéger au maximum, le système le plus fiable étant l’obtention d’une décharge par le client. Commerciaux, la balle est dans votre camps ! !

 

Or bizarrerie française, nos équipes commerciales ne négocient que rarement les termes et l’organisation juridiques d’une affaire « qu’ils lèvent ».

 

Que reste-t-il comme solution, sinon la prudence extrême ? Deux cas de figure sont alors à envisager.

 

Premier cas, peu enviable, où nous sommes dans le cadre d’une prestation avec une obligation de résultat. Il n’y a rien à faire mis à part tabler sur un passage sans aucun incident.

 

Autre possibilité, plus ambiguë, avec l’obligation de moyens. La société a mis tous les moyens pour que le passage se fasse au mieux, mais elle n’a pas pu tout prévoir. Notre SSII est-elle pour autant totalement déchargée ?

 

Une réponse tranchée ne peut être apportée. N’oublions pas toutefois, que pèse sur la société de service une obligation de conseil qui découle des termes de la loi. Un professionnel se doit d’informer et de conseiller le non-professionnel. L’informaticien se doit alors de prévenir l’entreprise chez qui il intervient sur toutes les conséquences de la « migration ». Il doit procéder à un état des lieux, et compte tenu de ses connaissances, informer le chef d’entreprise des risques qu’il encourt dans tel ou tel domaine. Dans son obligation de conseil, la SSII a une obligation de résultat : l’entreprise cliente doit être prévenue.

 

Le contrat peut ainsi prévoir seulement une obligation de moyens, la loi, en imposant une obligation de conseil, induit une obligation de résultat.

 

Aujourd’hui ce sont les informaticiens qui ont du « pain sur la planche », il est a parier que demain les juristes auront la partie belle pour nous sortir de cet imbroglio juridique. Seul conseil à apporter aux SSII aujourd’hui : soyez extrêmement vigilant, demandez des comptes-rendus mensuel à vos salariés sur les difficultés que risquent de rencontrer l’entreprise chez qui ils interviennent, faites part de ces observations à vos clients. Et surtout, surtout, lisez bien vos contrats d’assistance technique, négociez tout, et n’oubliez pas qu’un seul mot dans un contrat peut être lourd, très lourd de conséquences.

 

 

Karim Guellaty